[ Libre. ]

Lueur Éphémère voyait bien. Curieusement. Mieux qu'en plein jour. Peut-être le soleil l'agressait-il ? Le Clan des Étoiles, lui, semblait plutôt lui offrir son soutien quand ses guerriers commençaient à apparaitre dans le ciel sombre. La vieille guerrière se sentait sereine. Comme on dit, la nuit porte conseil.

Malgré sa vue qui s'améliorait considérablement à partir du crépuscule, elle se rendait compte qu'elle n'était toutefois pas plus agile. Et l'humidité aggravait ses douleurs. Elle avait surtout mal aux pattes.

Mais elle avait voulu venir ici pour se tester. Lorsqu'elle était apprentie, quand son mentor ne pouvait pas s'occuper d'elle, elle venait s'entrainer en secret dans ce marécage. Parfois la nuit, quand les autres dormaient. Ce qui lui avait permi de devenir guerrière rapidement, et une guerrière assez douée, se vantait-elle.

Et elle se rendait compte à présent à quel elle avait régressé. Elle était encore moins douée qu'un apprenti.

Quelquefois elle avait songé à aller voir le Guérisseur. Peut-être pourrait-il l'aider ? Mais sa fierté l'en empêchait. Elle refusait de montrer aux autres qu'elle souffrait.

Lueur Éphémère. Ce nom lui allait bien. Si elle avait brillé, un temps, ce temps était passé. Elle n'était plus que l'ombre de ce qu'elle avait été.

Elle sauta sur une pierre qui dépassait, pais se rétablit mal et glissa dans la boue. Son blanc poitrail était maintenant caché par un immonde masque de vase. Elle ne s'en préoccupa pas et et bondit sur une motte de terre proche.

Elle avisa alors une silhouette féline qui lui montrait son flanc. Plissant légèrement ses yeux bleus, elle reconnut son Lieutenant. Elle s'étonna : personne ne venait dans le marécage, c'était dangereux. Beaucoup y avaient péri. Mais Cœur de Lumière n'était pas né de la dernière pluie. En fait, lui aussi était assez vieux, comme elle. Et il ne songeait pas en cachette à devenir Ancien, comme elle. D'ailleurs, si lui ne décidait pas d'aller dormir dans la tanière des Anciens, pourquoi elle le devrait ?

Elle s'approcha de lui le plus silencieusement qu'elle put, quand une bourrasque un peu plus forte que les autres ébouriffa ses poils qui n'étaient pas englués dans la boue. Droit vers le Lieutenant. Quelle idiote. Une erreur d'apprenti. Se mette dos au vent ! Son odeur parvint sûrement au museau du mâle.

Tant pis pour la discrétion, elle froissa sans pitié les herbes qui poussaient là, pour parvenir jusqu'au Lieutenant.

— Ce marécage est agréable, la nuit, quand on connait ses pièges, fit-elle innocemment.

Elle était heureuse d'avoir quelqu'un à qui parler. Surtout un vieux, comme elle.